« La sociologie et le chiffre. Ou existe-t-il des nombres objectifs ? »

In Pariente A., Les chiffres en finances publiques, Mare & Martin, Collection Droit & Gestions publiques, 2019, p. 247-265.

C’est à un voyage à travers la sociologie qu’invite ce chapitre, et la manière dont elle a travaillé le chiffre et avec le chiffre. Il commence aux débuts de la sociologie française et par la « complicité originaire » qu’elle entretient avec la statistique ; la sociologie accordait alors, de prime abord, une objectivité aux chiffres utilisés. Les années 1970 et 1980 sont marquées par les premiers travaux qui questionnent les statistiques, montrant qu’elles sont le produit d’un processus historique et social, de la mise en œuvre de schèmes de classement, d’interactions et de rapports de force entre acteurs sociaux. Ces travaux vont donner lieu au développement, à partir des années 2000, d’un nouveau champ de la sociologie qu’Alain Desrosières, l’un des initiateurs de cette nouvelle manière d’aborder le nombre, a proposé de nommer la « sociologie de la quantification ». Les informations chiffrées changent alors de statut, passant de moyens de connaissance à objets d’analyse, ou points d’entrée pour l’analyse de processus et phénomènes plus larges. Tentant de prendre la mesure théorique et méthodologique de ces recherches, des travaux récents proposent de penser l’objectivité en termes d’« objectivité enrichie », car co-construite avec les acteurs dont la situation ou l’activité sont l’objet de la quantification.

La sociologie et le chiffre. Ou existe-t-il des nombres objectifs, in Les chiffres en finances publiques aux éditions Mare & Martin.